Omar da Fonseca : "Le départ de Messi, la démesure du football"
Etonné par le timing de l'annonce du départ de Lionel Messi, Omar da Fonseca a réservé à beinsports.com sa première intervention sur ce sujet qui l'attriste.
Omar da Fonseca, comment avez-vous réagi à l’annonce du départ de Lionel Messi du FC Barcelone ?
Heureusement que lorsqu’on a appris la nouvelle, j’avais les yeux fermés car si je les avais ouverts, évidemment que j’aurais souhaité autre chose. La manière et la stratégie m’interpellent quelques heures après l’annonce d’un accord entre la Liga et un fonds d’investissement. Cela semble fortement réfléchi alors que le Barça avait jusqu’au 31 août pour l’annoncer et que le club avait affirmé que Lionel Messi allait prolonger. Depuis, il y a aucune réaction des joueurs. C’est très étrange…
Ce que disait Omar Da Fonseca en octobre 2020 sur le départ de Messi
Je suis un romantique : j’ai toujours dit que s’il fallait qu’il s’en aille, cela devait être digne. Et là, cela mêle déception, incompréhension et illusions des uns et des autres… Cela fait aussi mal au football dans l’ensemble car il faut mettre de l’optimisme dedans. Là c’est mettre le football dans la démesure ou de la démesure dans le football. Quelque part, tu te dis que si Messi veut vraiment rester, il reste. Qu’est-ce que c’est pour lui 20 millions de plus ou de moins ? Le ballon veut jouer mais les intérêts veulent avoir raison ou gagner. Là, le vocabulaire employé ne me plaît pas du tout : cela parle de rupture, de stratégie, de supporters frustrés… Le football n’est pas fait pour ces choses-là.
C’est un nouveau camouflet pour le football espagnol…
La Liga a déjà perdu Cristiano Ronaldo et Neymar. Là, c’est Lionel Messi, cela veut dire qu’il y a une structure et une manière de faire qui ne sont pas les bonnes. D’un autre côté, quand tu veux faire croire que les clubs et les institutions sont plus forts que les joueurs, on met en doute tout ça : Neymar est parti avec la clause, Ronaldo est parti quand on ne pouvait pas le payer, Sergio Ramos est parti aussi…
La réaction de Laporta au départ de Messi
Pensez-vous que Joan Laporta, le président du Barça, savait qu’il ne pourrait pas faire prolonger Lionel Messi dès les semaines précédentes ?
J’ai envie de dire non. Mais l’accord avec le fonds d’investissement m’interpelle tout de même. Est-ce que cet accord, contesté par Laporta en conférence de presse, n’a pas un lien avec le départ de Messi ? Je m’interroge. On sait que Florentino Pérez, le président du Real Madrid, et Joan Laporta sont contre ça car eux voulaient gérer eux-mêmes avec la Super Ligue… Pour revenir au pouvoir, Laporta avait quand assuré qu’il allait faire prolonger le contrat de Messi.
Croyez-vous à un coup de bluff de la part du Barça qui espère toujours acter la prolongation ?
Je ne suis pas dans la tête de ces personnes, je voulais juste être dans les pieds de Messi éventuellement (sourire). Dès le début, j’ai dit : « Si jamais Messi s’en va, évidemment, moi ce que je veux, c’est qu’il vienne à Paris. » Même si Messi partait demain au fond du Groenland, j’irais regarder ses matchs. Peu importe le maillot que Messi mettra sur son dos, je continuerai à regarder ses matchs car Messi m’inspire des sensations qui me font du bien. Le côté rupture, ça me touche quand même. C’est drastique : on ne sait même pas qui est le bon ou le méchant de ce film. Je ne veux même pas chercher à comprendre. J’ai lu tous les journaux espagnols, cela parle de clauses, de contrôles, impôts, que des mots pour réduire le football à ce qu’il ne doit pas être. Ce n’est pas pour ça que tu vas au stade… La plupart des joueurs ont grandi avec le football, lui a fait grandir le football et le sport. C’est ce genre de joueurs comme Diego Maradona qui sont universellement reconnus. Messi n’est en plus pas un mec qui se la raconte. Toutes ces histoires-là dépassent ce cadre de jeu, de plaisir et de sourires.
Joan Laporta a affirmé que « l’ère après-Messi sera pleine de succès ». Y croyez-vous ?
Ce départ intervient peut-être plus tôt que prévu mais cela allait arriver. J’ai toujours dit que le jour où Messi quittait le football, les ballons et les poteaux de corner allaient pleurer. Il y aura forcément un après-Messi mais je voudrais que tout soit faux… Ce n’est pas dès demain qu’on aura un joueur comme lui, c’est évident.
Le PSG et Manchester City se dégagent comme les deux clubs capables d’accueillir la Pulga. On a cru comprendre vers quel club allait votre préférence…
S’il faut vraiment tourner la page Barcelone, il ne faut pas déchirer le livre. Si on peut imaginer que Messi mette le maillot du PSG, pour moi, ça serait incroyable. Qu’il puisse jouer avec Mbappé, Neymar, Di Maria, Ramos… ce n’est même plus les Galactiques, les Stratosphériques ou les Magnifiques… On va être obligés de trouver des noms venus d’ailleurs. Cela risque de nous fragiliser humainement (sourire). S’il vient à Paris, je l’aide à faire son déménagement, je loue 3 places pour le Parc des Princes et je prends la gazinière à côté ! Je suis un vieux monsieur et je veux encore vivre des grands moments.
La presse européennes réagit au départ de Messi
Malgré cela, vous avez du mal à digérer cette nouvelle…
C’est sûr que cela me gêne qu’il parte comme ça. Il va laisser un vide inimaginable au Camp Nou. J’ai des amis à Séville et un peu partout en Espagne : aucun d’entre eux ne souhaite qu’il s’en aille. La grande majorité des supporters ne veulent pas qu’il parte, comme c’était le cas à l’époque avec Cristiano Ronaldo. Ces joueurs-là, il ne faut que l’amour que l’on porte à ces joueurs se transforme en une simple histoire d’argent. C’est ce qu’on vit là. C’est sûr qu’il y a une réalité institutionnelle mais je veux encore vivre comme un supporter. Plus ça avance, plus on rabaisse le football. Entre nous, c’est indécent que Messi gagne ces sommes-là, comme certains autres très grands joueurs. C’est impossible à l'expliquer à nos enfants ou à nos petits-enfants. Mais il faut pouvoir continuer à croire au sport et au football. Le sport, on en a énormément besoin sociétalement pour continuer à s’unir, à se confronter et à s’aimer.