Milan - San Remo : la Visma – Lease a bike déjà lancée vitesse grand V
Vainqueur la semaine dernière de Paris-Nice grâce à Matteo Jorgenson, et de Tirreno-Adriatico par Jonas Vingegaard, l'équipe néerlandaise confirme son statut d'épouvantail du peloton.
On avait quitté la Jumbo-Visma sur une saison 2023 exceptionnelle, marquée par une victoire dans les trois Grands Tours et une conclusion en apothéose avec le triplé sur la Vuelta. Mais l'hiver avait fait naître quelques fissures dans la cuirasse de la formation, lâchée par un de deux sponsors principaux, et proche de devoir allier ses forces avec une de ses rivales, la Soudal Quick-Step, pour garantir une place au sommet. Quelques coups de pédale plus tard, l'identité – appelez désormais les "Abeilles" la Visma – Lease a bike – a changé, pas la domination. Ce début de saison tonitruant, en particulier sur les courses à étapes, laisse entrevoir une continuité de l'escouade néerlandaise dans le succès.
V comme Victoire
Les chiffres sont implacables. Les coureurs de Richard Plugge étaient ceux qui avaient le plus levé les bras en 2023, et c'est déjà le cas cette année. Les succès la semaine passée sur Paris-Nice et Tirreno -Adriatico (six en sept jours !) ont porté le total de victoires à 15 en 2024, le meilleur bilan du peloton. Si UAE Team Emirates, Israel – Premier Tech (à 13), la Soudal – Quick-Step et la Lidl-Trek (à 12) suivent encore la cadence, les bilans sont divisés par deux une fois sortis de ce Top 5.
Visma – Lease a bike a frappé fort, en étant capable de peser sur deux courses à étapes - deux des plus importantes de la première partie de saison – simultanément. La preuve d'une densité de talent inchangée, ce malgré les quelques mouvements de l'intersaison. Car si Primoz Roglic est parti chez Bora - Hansgrohe, l'équipe néerlandaise a su compenser la perte de l'ancien vainqueur du Tour de France. Pour sa première grande course d'une semaine avec sa nouvelle formation, l'Américain Matteo Jorgenson (ex-Movistar) a remporté le classement général de Paris-Nice, la plus belle victoire de sa jeune carrière, à seulement 24 ans.
"Pour être honnête, je ne m’attendais pas à gagner en débutant cette semaine, je voulais juste faire une belle course et j’aurais été content avec une place sur le podium" a-t-il réagi après sa victoire dimanche dernier. "Cela veut clairement dire quelque chose pour moi. Je ne vais pas débarquer en disant que je vais gagner un Grand Tour que je vais être un immense champion, mais cette semaine était vraiment bonne." Un discours pas si éloigné de celui que pouvait tenir un autre Américain au paletot jaune et noir, Sepp Kuss, qui a obtenu le statut de vainqueur en Grand Tour en décrochant le Tour d'Espagne l'an passé. "J'ai passé un cap" a-t-il poursuivi. "Je ne dirais pas que c'est un cap monstrueux. Mais dans cette équipe, ils font vraiment attention à chaque moindre détail."
Jorgenson, comme ses coéquipiers, a ainsi fait parler de lui par la forme de son nouveau casque de contre-la-montre, entre bicorne napoléonienne symbole des fameux gains marginaux chers à Visma – Lease a bike, et qui avaient notamment permis à Jonas Vingegaard d'assommer Tadej Pogacar sur le chrono individuel du dernier Tour de France.
V comme Vingegaard
Le double tenant du titre de la Grande Boucle, justement, est lui aussi parfaitement lancé, après sa victoire sur Tirreno-Adriatico, les deux principales étapes de montagne en prime. "Je pense que je suis en meilleure forme que l'an dernier et la saison précédente à la même époque" assurait Vingegaard au terme de la "Course des deux mers", conclue avec un appétit débordant. "La saison ne tourne pas qu'autour du Tour de France, c'est mieux de tenter quelque chose maintenant, de gagner des courses."
Alors qu'il avait débuté par son habituel festin de reprise sur O Gran Camiño (trois des quatre étapes, la première ayant été gelée à cause des conditions météo et le classement général), Vingegaard a encore passé la vitesse supérieure sur Tirreno-Adriatico, se montrant sans rival dès les premières pentes. "Je pense que je suis le premier humain de cette course" préférait en sourire Juan Ayuso (UAE Team Emirates), repoussé à 1'24" au terme de l'épreuve. "Chapeau à Jonas. Pour le moment, il est sur une autre planète donc on doit se battre pour la deuxième place."
V pas (encore) comme Van Aert
La concurrence a de quoi s'inquiéter, même si "Vingo" va arriver une période "creuse" de sa saison, à préparer dans l'ombre le Tour. Le moment pour l'autre habituel chasseur de bouquets de l'équipe, Wout van Aert d'entrer en scène. Le Belge s'est montré presque discret en 2024 sur route, comme dans les sous-bois. "WVA" a fait le choix d'alléger son début de saison en cyclo-cross, comme sur le bitume en faisant l'impasse sur les Strade Bianche et sur Milan – San Remo disputé ce samedi.
Van Aert s'est réservé pour les classiques flandriennes - sur lesquelles il devrait être assisté de… Matteo Jorgenson, aussi à l'aise sur les courses d'un jour - qui débutent la semaine prochaine avec le Grand Prix E3 le 22 mars, puis Gand-Wevelgem deux jours plus tard. Autant d'occasions pour le coureur d'outre-Quiévrain de garnir son armoire à trophées ainsi que celle de sa crèmerie.
Car si la Visma – Lease a bike aborde Milan - San Remo sans le vainqueur 2020 de l'épreuve, elle ne manquera pas d'arguments pour autant. Le Français Christophe Laporte peut espérer a minima un premier Top 10 sur la Primavera, après deux 13e places, lui qui a terminé parmi les dix premiers des trois courses auxquelles il a pris part cette saison. Et en cas de sprint à l'arrivée à San Remo, Olav Kooij serait un prétendant légitime à la victoire. Le Néerlandais de 22 ans signe un début de saison canon avec un succès sur chacune des courses qu'il a disputé en 2024 : la Clasica de Almeria, mais surtout une étape de l'UAE Tour, puis deux de Paris-Nice. Au cas où les "abeilles" de l'ex Jumbo ne piquaient pas assez comme ça…