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Del Toro leader, le Top 3 en moins d'une minute : à qui le maillot rose à Rome ?
La lutte pour la victoire finale du Tour d'Italie va se nouer dans les deux dernières étapes de montagne vendredi et samedi avec le Mexicain Isaac Del Toro leader sans marge de sécurité.
On attendait un vraisemblable duel entre Primoz Roglic et Juan Ayuso, erreur sur toute la ligne. Ce Giro 2025, envisagé comme assez ouvert derrière son duo de favoris l'est d'autant plus que le tandem ne verra pas l'arrivée à Rome dimanche. Les leaders annoncés de la Red Bull - Bora - Hansgrohe et d'UAE Emirates - XRG ont tous les deux abandonné en début de troisième semaine, minés par les chutes et déjà loin des meilleurs au classement général. Ceux-ci se nomment Isaac Del Toro, Richard Carapaz et Simon Yates avant les deux prochaines journées qui vont décider du vainqueur de ce Tour d'Italie.
Le premier cité n'était pas attendu à pareille fête, pas à cette occasion, ni si tôt dans carrière. Mais comme d'autres espoirs de la pouponnière UAE Emirates - XRG avant lui, le talent n'est pas une question d'années, 21 dans le cas de Del Toro. Présent comme élément de la rampe de lancement émiratie pour Juan Ayuso, éventuellement comme troisième leader derrière l'Espagnol et l'expérimenté Adam Yates, le vainqueur du Tour de l'Avenir 2023 ne lâche plus son paletot rose depuis la neuvième étape. Dans l'étape façon Strade Bianche, il avait fait exploser le peloton avant d'éreinter la concurrence, Wout van Aert mis à part. De patron d'un jour, "el Torito" était devenu sans le savoir le nouvel homme fort. Des siens et de ce Giro.
Les hauts et les bas de la découverte pour Del Toro
Car une fois actée la faillite d'Ayuso, Isaac Del Toro a globalement assumé le premier rôle. Il avait tenu le choc lors de la première étape de montagne, la onzième, terminant deuxième à dix secondes du vainqueur Richard Carapaz. Puis alors qu'on le pensait voué à reculer dans la hiérarchie après avoir souffert mardi lors de la 16e étape redoutable vers San Valentino, il a signé une superbe réaction d'orgueil dès le lendemain pour conserver son bien avant la dernière double ration de sommets de ce Giro.
"Je voulais imaginer ma première victoire comme ça", avait-il assuré à Bormio. "Jusqu'ici c'était plutôt un très bon Giro, mais là ce Tour d'Italie est incroyable." Sa révérence à l'arrivée à Bormio avait des airs du leader absolu de l'équipe UAE Emirates - XRG Tadej Pogacar. Ne lui manque plus que le caractère irrésistible et écrasant de ses succès, alors que le champion du monde s'est fait le spécialiste des écarts XXL. Avant les deux étapes décisives de ce 108e Giro, Isaac Del Toro ne compte que 41 secondes d'avance sur Richard Carapaz (EF Education - Easypost), 51 sur Simon Yates (Visma | Lease a bike).
"Mardi soir, il s'est déchargé d'une grande partie de son stress, il a enlevé le gros sac qu'il avait dans le dos", a expliqué Fabio Baldato, un des directeurs sportifs du maillot rose à L'Equipe après la 17e étape. "Le stress a pu retomber. Il s'est dit qu'il fallait en passer par là et qu'il avait quand même toujours le maillot rose. Ca compte de gagner une étape avec le maillot rose, c'est presque aussi fort que de gagner le Giro à la fin."
Le plus dur est à venir
Le Mexicain a la fraîcheur de sa jeunesse, ses jambes peuvent-elles en dire autant ? La 17e étape a été en ce sens rassurante, a fortiori après avoir lâché autant de lest la veille. Mais il n'a pas non plus chassé toutes les interrogations. Del Toro n'a pas été avare en efforts depuis le début de ces trois semaines transalpines et a en grande partie constitué son avance actuelle grâce à de multiples bonifications grattées (32 secondes de plus que Carapaz, 51 sur Yates qui n'en a disputé aucune). Et si sa victoire mercredi ne souffre d'aucune contestation, elle n'a pas eu lieu sur une arrivée bien moins sélective - des hauts pourcentages mais peu de kilomètres puis une descente technique - que celles au programme vendredi et samedi.
La 19e étape entre Biella et Champoluc sera le premier juge de paix XXL avec 4950 mètres de dénivelé au programme, des premières pentes après à peine quatre kilomètres de course et trois cols de première catégorie avant l'ultime montée du jour vers Antagnod, à cinq kilomètres de l'arrivée. Et le dessert de ce Giro est tout aussi copieux samedi vers Sestrières. Le peloton se frottera au Colle delle Finestre, un monstre de 18,4 kilomètres à 9,2 % de moyenne et absolument aucun moment de répit. Une méforme et des écarts réduits comme ceux au départ vendredi voleront en éclats. D'autant plus pour un Del Toro plus à l'aise sur les côtes explosives que les longues montées. "Carapaz est le plus fort dans la haute montagne, je le dis et le redis", admet d'ailleurs bien volontiers Fabio Baldato.
L'Equatorien fait jusque-là un Giro sans faute, et peut espérer décrocher un deuxième Tour d'Italie après 2019. Carapaz et Simon Yates ont pour eux l'expérience des très grands rendez-vous et un Grand Tour (la Vuelta 2018 pour le Britannique) dans la musette avant ces deux prochaines journées. Yates se rappellera d'ailleurs sans doute que c'est dans les pentes du Finestere qu'il avait sombré lors du Giro 2018, perdant 38 minutes ce jour-là avec le maillot rose sur les épaules quand Chris Froome signait un numéro pour renverser l'épreuve. "Tous mes rivaux sont vraiment forts et courent de manière intelligente tactiquement" estimait Isaac Del Toro jeudi soir.
Et les autres ?
"Je commence à m'habituer au maillot rose", souriait, insouciant, le Mexicain à l'arrivée de la 18e étape. "Pour les deux prochaines étapes, j'espère être à l'avant avec les meilleures jambes que j'ai jamais eues. On va voir ce qu'il s'y passera, mais je veux être devant. Je ne sais honnêtement pas ce qui va se passer dans les dernières étapes de montagne. Nous devons simplement être prêts. Je ne sais pas quelle sera l'étape la plus dure. Je ne veux juste pas trop souffrir."
Ces deux prochains jours pourraient changer sa carrière toute entière. Ou l'éjecter jusqu'en dehors du podium dans ce Giro qui a prouvé qu'aucun cador n'était à l'abri d'une défaillance ou d'un ennui. Quatrième du général jeudi soir, le Canadien Derek Gee ne pointe qu'à 1'57" de la tête et 1'06" du podium… Après avoir perdu 57 secondes dès la première étape après une chute dans le final. Le coureur de la formation Israel - Premier Tech a depuis affiché une très belle condition. "Au final, vous pouvez compliquer les choses avec la stratégie dans ce genre de courses, mais quand vous arrivez aux étapes 19 et 20, il y a deux choses qui décident comment vous allez : vos jambes et les montées" prophétise ainsi le directeur sportif de Gee, Sam Bewley à Cyclingnews.
Derrière, le vétéran Damiano Caruso (Bahrain - Victorious) reste en embuscade comme il en a l'habitude chaque Giro ou presque (5e à 3'06"). Plus loin, Egan Bernal (INEOS Grenadiers, 6e à 4'43") a tout à gagner à se montrer. Giulio Pellizzari (7e à 5'02") termine son Tour local en boulet de canon suite à l'abandon de son leader de la Red Bull - Bora - Hansgrohe, Primoz Roglic, et a fini dans le Top 5 des deux premières étapes de montagne de la semaine. Mais la vérité de vendredi matin pourrait ne plus être du tout celle de samedi soir.