Top 14 : Clubs et LNR soudés face à World Rugby
Les clubs professionnels et la LNR, par la voix de son président, ont exprimé leur défiance vis-à-vis des récentes décisions de World Rugby concernant la fenêtre internationale de novembre.
World Rugby a tenu bon. Alors que la tournée d’été a dû être annulée pour cause de crise sanitaire et afin de permettre aux fédérations de renflouer leurs caisses, le principe d’une fenêtre internationale de novembre allongée à sept semaines, du 24 octobre jusqu’au premier week-end de décembre, avec six rencontres au programme, dont la fin du Tournoi des 6 Nations 2020, a été entériné. Ce faisant, World Rugby a confirmé amender son Règlement 9 sur la mise à disposition des joueurs afin de mettre de côté la limite habituellement fixée à trois rencontres. Des décisions qui ont provoqué une réaction pleine d’hostilité de la part de la Ligue Nationale de rugby (LNR). Selon une information de l’AFP, la Ligue a décidé d’en passer par une « mise en demeure » adressée à World Rugby où elle demande à cette dernière « dans un délai de huit jours » de « préciser les conditions dans lesquelles les décisions sont prises, dans lesquelles le contrôle et la détention des sociétés composant World Rugby est assuré ainsi que d’identifier les personnes contrôlant ledit réseau ainsi que les flux financiers dudit réseau ». Une menace qui reste toutefois vague, la LNR parlant de « toutes les conséquences de droit relatives aux mises en demeure ».
Paul Goze surpris de la forme, pas du fond
Quelques heures après la publication du communiqué de World Rugby, le président de la LNR Paul Goze s’est longuement exprimé dans les colonnes du quotidien L’Equipe. Un entretien où le patron du rugby professionnel français assure qu’il s’attendait à de telles mesures venant de World Rugby, mais pas à la manière selon laquelle elles ont été présentées. « La seule chose qui me surprend, c'est qu'ils disent que cette décision a été prise après un dialogue sérieux et constructif, alors qu'il n'y a pas eu de concertation », assure l’ancien président de l’USAP pour qui la Fédération Française de rugby essaye de « passer en force ». « Avec la Fédération, il y a eu deux réunions, durant lesquelles il n'y a pas eu de dialogue, tonne Paul Goze. On a fait des avancées fortes en acceptant de passer de trois à cinq matches internationaux cet automne. Ils n'ont pas été sensibles aux efforts consentis. » Alors que World Rugby a défini le cadre, Ligue et Fédération vont désormais devoir se mettre autour de la table concernant l’organisation même de cette tournée automnale et le président de la LNR ne semble pas enclin à faire des concessions. « À partir du moment où on nous impose une fenêtre complètement différente et un nombre de matches qui n'est pas conforme à ce que nous voulons, il n'y a pas de raisons que l'on fasse des concessions sur la mise à disposition », ajoute un Paul Goze visiblement remonté.
Les présidents sur la même longueur d’onde que Paul Goze
Si le président de la LNR semble prêt au combat contre World Rugby et, par extension, la FFR, certains présidents de clubs n’ont pas caché leur désapprobation face aux décisions prises par l’instance internationale. « C'est à nouveau une période où on ne pourra pas compter sur nos joueurs et où on reprendra le Championnat dans des conditions précaires, a confié le président du Racing 92 Jacky Lorenzetti dans les colonnes du quotidien L’Equipe comme deux autres de ses pairs. Nos joueurs deviendraient quasiment à mi-temps ceux de l'équipe de France alors que nous les payons intégralement. Il y a une injustice financière, sportive, dont on se serait bien passés dans cette période. » Pour Bernard Lemaître, président du RC Toulon, les internationaux ne sont « pas du tout en ligne avec ce calendrier » et pose ouvertement la question de l’état de forme de ses joueurs appelés en équipe de France après avoir disputé jusqu’à six matchs internationaux de haut niveau dans une fenêtre réduite de sept semaines. Du côté de Toulouse, Didier Lacroix confirme l’inquiétude de son club, craignant pour l’équité du championnat dans « les saisons de sur-sollicitation des internationaux français. Si ce dernier assure qu’« on ne peut pas s'opposer à l'envie de nos joueurs de porter le maillot du quinze de France », « ni à l'envie de Fabien Galthié de les avoir pour préparer la Coupe du Monde », il demande toutefois une « dose d’équilibre ». En effet, Toulouse pourrait être lourdement handicapé si, comme la LNR le prévoir, l’essentiel de cette fenêtre internationale soit composée de doublons. Le rugby français est sur le point de s'entre-déchirer et le XV de France, à trois ans de la Coupe du Monde, pourrait ne pas en sortir gagnant.