Vancouver Grizzlies, le Canada qui perdait (beaucoup)
Qui aurait pu croire, il y a 20 ans, que le champion NBA serait canadien, lorsqu'on se remémore notamment l'échec majeur des Vancouver Grizzlies ?
Heureusement pour le basket au Canada, les Toronto Raptors ont tenu le choc jusqu'à aller conquérir le titre suprême. Car s'il avait fallu compter sur les Vancouver Grizzlies pour pérenniser la NBA dans l'autre pays d'Amérique du Nord... Les deux franchises ont été créées la même année, en 1995, afin d'élargir les frontières de la Ligue, deux ans après le doublé des Blue Jays de Toronto en baseball (1992, 1993) qui permettait au Canada de compter enfin réellement pour autre chose que le seul hockey national. Mais les Grizzlies, du nom de l'animal typique des montagnes du nord-ouest du continent, ont été littéralement empaillés.
Emmenés notamment par Byron Scott, ils échouent avec le pire bilan (15-67). La saison suivante, malgré Bryant Reeves en choix n°3 de la draft, pas mieux : c'est encore le pire bilan de NBA (14-68). Avant-derniers de la division Midwest en 1998 (19-63), ils affichent à nouveau le pire bilan en 1999 (8-42, avec la grève des joueurs). Encore derniers de la division les deux années suivantes, cette fois avec des saisons dépassant tout de même les 20 victoires, les Grizzlies deviennent la franchise à atteindre le plus rapidement les 300 défaites dans l'histoire de NBA. Ils prennent alors la route de Memphis, au vu de l'étendue du flop. Qui, néanmoins, a contribué à aiguiser la curiosité de l'ensemble des Canadiens pour le ballon orange.
Une vingtaine d'années plus tard, Mike Bibby, qui a commencé sa carrière à Vancouver de 1998 à 2001, milite pour une seconde chance : « Regardez comment Toronto a survécu. Vince Carter est sorti de ma promotion de draft, il était tellement plus excité que nous... Ça ne nous a pas aidés, on ne gagnait pas, on n'était pas attirants. » En 2011, David Stern confiait pourtant ses regrets, alors que la soeur jumelle américaine Seattle était également privée de son équipe sept ans plus tard (les SuperSonics laissant leur place au Thunder d'Oklahoma City en 2008).
En 20 ans, Vancouver est devenue l'une des villes les plus attractives du monde, notamment au niveau de la spéculation immobilière entretenue par les Asiatiques. Les irréductibles locaux auraient aimé que Steve Nash, le local de l'étape, puisse être le porte-étendard de la franchise. L'ancien propriétaire Michael Heisley (décédé en 2014) estimait que la douceur de Vancouver était la rançon de sa gloire, que la possibilité de cumuler pêche, chasse, ski et golf était un frein à l'implantation d'un vrai marché NBA qui pourrait fédérer une population en mal d'occupation.
Et surtout, il y a cet incontournable hockey... « Quand les Grizzlies sont partis, ça a sauvé les Canucks, vers qui tous les fans se sont reportés, expliquait l'homme d'affaires en 2011. Ils sont devenus une des meilleures équipes de NHL. Or, y'a-t-il suffisamment de supporters et de soutien financier pour deux équipes dans la même salle ? Voudriez-vous affaiblir cette équipe de hockey qui joue le titre ? » Vancouver a retrouvé la finale de Stanley Cup en 2011, après une disette de près de 20 ans (1994). Et elle est sans doute toujours plus proche de l'atteindre que de voir refleurir une bien hypothétique franchise de NBA.